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Tuesday, December 06, 2011

Tunisie: L'indépendance de la Banque Centrale


L’indépendance de la banque centrale !!

Une hypocrisie générale

Après un Sit In des agents de la banque centrale tunisienne (BCT) et un communiqué de son gouverneur, la Troika tunisienne (Nahdha, CPR, Attakottel) retire sa proposition de mise de la banque centrale sous la tutelle du gouvernement !!!!

Au-delà de notre effarement de la versatilité de nos gouvernants, nous considérons que la mise sous-tutelle de la BCT est une bonne directive, et que son indépendance est la négation même de la politique, pis encore elle est une forme de négation de la démocratie

Nous nous emploierons dans ce qui suit à étayer notre argumentaire. Un préalable est nécessaire, à savoir l’appréhension de la monnaie, de la création monétaire, et du rôle de la banque centrale.

Quelques préalables

Jamais dans l’Histoire, hormis peut-être dans l’Antique Mésopotamie !, la monnaie ne fut à ce point «dématérialisée ». La quantité de monnaie qui existe à un moment donné dans l'économie, ce qu'on appelle la Masse Monétaire, est constituée de pièces, de billets (frappés par la banque centrale) et, surtout, puisque c'est environ 90% du total, de monnaie scripturale, c'est-à-dire de chiffres inscrits sur les comptes en bancaires. C’est la Monnaie Crédit.

On pense intuitivement que lorsqu'une banque accorde un crédit, elle prend l'argent quelque part sur d'autres comptes ou dans ses réserves pour mettre cet argent sur le compte à créditer. On suppose tous a priori que cette somme existait déjà quelque part.

Cette intuition est complètement fausse. Pis encore, ce qui se passe en réalité c'est l'effet inverse. Quand une banque accorde un crédit de 10 000 dinars, à l'un de ses clients, elle ne transfère pas l'argent de ses propriétaires, et il ne s'agit pas, non plus, d'un prélèvement dans les comptes de ses clients. La banque ne prélève les 10 000 dinars nulle part. La banque a créé, purement et simplement, par simple écriture comptable 10 000 dinars qui n'existaient pas avant, et qui viennent s'ajouter à la quantité de monnaie qui circulait déjà dans l'économie.

Tout crédit bancaire est donc une création de monnaie. Ce qui revient à dire que la création monétaire, dans nos économies, est liée aux crédits que les banques accordent, chaque jour, à leurs clients.

Ce mécanisme de la création monétaire par le crédit bancaire est le cœur battant de l'économie monétaire capitaliste

Il ne faudra pas déduire de ce qui précède que les banques peuvent créer de la monnaie à volonté, accorder des crédits n'importe comment et peuvent ainsi acheter le monde (quoi que !). Il existe des mécanismes de contrôle qui limitent à la création de monnaie par les banques. Ces mécanismes de contrôles sont mis en place par la Banque centrale. On dit que la banque centrale contrôle le pouvoir discrétionnaire conféré aux banques, à travers plusieurs mécanismes

· Les banques sont tenues d’avoir des réserves obligatoires dans la Banque centrale

·

· La banque centrale contrôle les crédits à travers ses taux directeurs,

· Elle intervient sur le marché de change,

· Elle fixe les règles prudentielles,

Quand on sait que la monnaie est créée à partir de rien, pourquoi nous acceptons cette monnaie comme moyen d’échange et comme réserve de valeur ?

Nous procédons par introspection. Posez-vous cette question « Pourquoi acceptons-nous, dans nos échanges, une monnaie créée à partir de rien ». La réponse tient en un mot : « confiance ». L’acceptation de la monnaie repose sur la confiance qu’un peuple exprime dans les hommes politiques, dans les institutions; dans l’économie dans l’Etat. C’est une « convention politique ».

L’indépendance de la Banque Centrale

La BCT est l'un des piliers de l’édifice monétaire tunisien. Elle est « la Banque des Banques ». Cette définition explique que la Banque Centrale a pour mission d’assurer le bon fonctionnement du système monétaire. C’est aussi la Banque Centrale qui approvisionne les banques commerciales en billets de banque ainsi qu’en devises étrangères. C’est, surtout, la Banque Centrale, qui, dans une économie, assure le rôle de « Prêteur en dernier ressort », c'est-à-dire de « sauveur en dernier ressort » des banques commerciales, quand ces dernières risquent de couler, comme ce fut récemment le cas en occident (crise subprime)

Dans les années 70, les tenants de la théorie dominante en économie qu’on affabule volontiers de libéraux, néoclassique, monétaristes… ont développé le concept de banque centrale indépendante, c’est-à-dire non soumise aux directives du gouvernement. Leur argumentaire est le suivant : si on soumet la banque centrale au pouvoir politique, ce dernier peut user de la création monétaire (notamment dans les périodes post électorales) pour financer son déficit, augmentant ainsi artificiellement la masse monétaire. Cette création excessive de la monnaie se traduit par une inflation et une perte de confiance dans la monnaie nationale. C’est la raison pour laquelle il faut une banque centrale doit être indépendante du pouvoir exécutif.

Les adeptes de cette doctrine considèrent que la monnaie est neutre c’est-à-dire que la création monétaire est forcément inflationniste et elle n’a aucun effet sur le chômage et la croissance !!!

En revanche, les Keynésien, considère que ce raisonnement a-monétaire est complètement faux et que l’économie capitaliste est avant tout une économie monétaire où la monnaie peut influencer l’économie réelle (croissance et emploi).

Nous sommes de cet avis, pis encore nous considérons que l’indépendance de la banque centrale est la négation même de la politique ! Comment peut-on relancer une économie tunisienne sans l’outil monétaire ?

Le pouvoir public doit avoir la possibilité de :

Ü se financer, dans des proportions raisonnables par création monétaire.

Ü Dévaluer sa monnaie pour relancer ses exportations et le tourisme.

Face à une baisse de la demande effective nationale (ce qui est le cas en Tunisie) on est face à deux choix.

Ü Ne rien faire, car la monnaie est neutre et laisser l’économie réelle s’auto-ajuster : fermeture d'entreprise et augmentation du chômage.

Ü User du pouvoir discrétionnaire (création monétaire) pour relancer la croissance et lutter contre le chômage avec un risque inflationniste.

La deuxième solution suppose une mise sous tutelle de la banque centrale.

Enfin, tout ce débat est une hypocrisie générale… Il n’y pas de banque centrale indépendante !!!! Dans la pratique le gouverneur qui est nommé par le gouvernement. Il obéit ainsi de fait aux directives du gouvernement. Ce qui est le cas dans toutes les nations (excepté la Banque centrale européenne et là c’est un autre débat). Aux États-Unis c’est le directeur du trésor qui dicte au gouverneur la politique à suivre, même si il est, sur papier, considéré comme indépendant !!!

Cependant, le pouvoir de création monétaire du gouvernement doit être utilisé avec raison, et c’est à l’opposition démocratique que revient le devoir de contrôler la politique monétaire !!!

Que dieu protège la chère et tendre Tunisie

Walid HASNI

http://tunisitri.wordpress.com/2011/12/02/tunisie-onze-mois-apres-quel-bilan/#more-4270/

http://tunisitri.wordpress.com/2011/11/04/walid-hasni-lettre-ouverte-a-monsieur-rached-ghannouchi/#more-4108/

http://tunisitri.wordpress.com/2011/11/02/dinar-convertible-ce-n%E2%80%99est-ni-la-priorite-ni-le-moment//

http://tunisitri.wordpress.com/2011/06/27/tunisie-ebauche-d%E2%80%99un-programme-keynesien/

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