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Tuesday, May 21, 2013

Sortie de crise en Syrie

Sortie de crise en Syrie : quel rôle pour Manaf Tlass ?


Selon des sources américaines bien informées à Washington, dont les propos cités par l'agence de presse Asia sont reproduits par All4Syria, la "solution pour la Syrie" dont devrait discuter les deux présidents américain et russe au cours du mois de juin prochain, en marge du G 8, comporte les éléments suivants :

Manaf Tlass
1 / Etablissement d'un cessez-le-feu entre l'Armée Syrienne Libre (ASL) et l'armée régulière.
2 / Fixation de la date des négociations entre les parties syriennes en conflit. Durant la période de préparation à cette conférence, l'ASL désignera un Conseil militaire supérieur dont la direction sera assurée par un officier acceptable par le régime et par les Américains, le général déserteur Manaf Tlass. Il prendra donc le commandement de l'ASL. Le général Sélim Idriss, qui a démontré son incapacité lors des récents combats, se mettra sous ses ordres. Le général Tlass est en effet bien considéré par les soldats comme par les officiers ayant déserté de l'armée régulière. Ceux-ci auront la possibilité de réintégrer la carrière militaire après la mise en œuvre de la situation politique.
3 / Avec l'ASL, le général Tlass se chargera de liquider les groupes radicaux, Jabhat al-Nusra et Ahrar al-Cham, mais aussi les autres groupes terroristes inacceptables pour les Etats-Unis. L'armée régulière aura pour mission de faciliter la mission de l'ASL dans les régions désignées comme "lignes de contact".
4 / Une fois les groupes terroristes supprimés, le Haut Conseil Militaire présidé par le général Manaf Tlass composera une délégation militaire. Elle sera accompagnée lors des négociations par une délégation politique mise sur pied par le Conseil Coalisé des Forces de l'Opposition et de la Révolution.
Les négociations entre les parties syriennes se dérouleront sous l'égide des Etats-Unis et de la Russie. Les deux Etats participeront à la Conférence de dialogue prévue. Tous les points de divergence seront négociés entre les parties en présence. Russes et Américains exerceront sur elles les pressions nécessaires pour parvenir à une solution. Le président syrien fera des concessions sans caractère fondamental : il cédera au gouvernement temporaire, auquel il reviendra d'organiser des élections démocratiques, des prérogatives n'entrant pas en opposition avec celles du chef de l'Etat. Pour les Russes, le transfert de la totalité des pouvoirs n'est pas nécessaire, le gouvernement temporaire pouvant se contenter de prérogatives n'incluant ni les Affaires étrangères, ni l'Intérieur, ni la Défense. Les Américains négocient actuellement ces points, qu'ils n'ont pas encore approuvés.
Au cours des négociations, des commissions seront constituées pour mener sur le terrain l'opération de désengagement entre l'ASL et l'armée régulière. Le général Manaf Tlass devra réprimer ceux qui ne respecteront pas les consignes de cessez-le-feu. Il devra aussi regrouper sous son autorité, dans des régions aux mains de l'ASL, les armes et les hommes armés, de manière à donner à la délégation d'opposition dans les négociations la capacité de le faire au nom de la révolution.
Les Américains font confiance à Tlass. Ils estiment qu'il est capable de réaliser ce qui lui sera demandé. L'administration russe est encore plus confiante. Elle considère que l'intéressé pourrait faire de nouveau allégeance au régime, aussitôt stabilisée l'équilibre des forces sur le terrain. Une fois les moujahidin arabes anéantis, il pourrait pencher à nouveau en faveur du régime.
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Ce n'est pas la première fois que la propagande du régime, dont l'originalité n'est pas au niveau des sommes investies pour égarer les opinions publiques, dévoile des plans secrets purs produits de son imagination.
A la fin du mois de mars 2011, la revue "Abiyad Aswad", propriété d'un fils de l'ancien ministre de la Défense Hasan Tourkmani, et de ce fait unique hebdomadaire syrien autorisé à traiter de questions "politiques",  avait reproduit un "Plan" attribué au prince saoudien Bandar bin Sultan et à l'ambassadeur des Etats-Unis à Beyrouth, Jeffrey Feltman. Il était destiné, mais les responsables syriens s'en sont eux-mêmes chargés, à "ramener la Syrie à l'âge de pierre". Sa divulgation par le site Filkka Israël n'était destinée qu'à lui donner du crédit. Quelque temps plus tard, à la mi-avril, un "Plan détaillé de stabilisation" visant à empêcher les protestations de se développer, attribué aux Renseignements généraux, était à son tour jeté en pâture aux lecteurs dans divers médias.
Ce nouveau plan est rendu public au moment où - dit-on une nouvelle fois... - le général Manaf Tlass, qui a fait défection et fui la Syrie sans avoir rallié la révolution, serait sur le point de dévoiler son "projet politique" et d'entamer sa mise en oeuvre. Il était donc tentant pour le régime de s'employer à le déconsidérer en mêlant le vrai au faux et d'instiller ou de conforter le doute sur la réalité de ses intentions.
Il n'est plus guère un secret pour personne que l'ancien camarade de Basel puis de Bachar Al Assad a l'intention de rentrer bientôt dans son pays. Il pense être en mesure de réunir rapidement autour de lui, d'une part, les déserteurs de haut rang regroupés dans l'Armée Syrienne Libre et, d'autre part, les officiers toujours en poste dans l'armée régulière mais acquis au changement. Ils sont restés à la tête de leurs unités pour des raisons différentes : soumis à une surveillance de tous les instants, les uns n'ont pas eu l'occasion ou le courage de déserter ; d'autres ont pensé être plus utiles à la révolution en coopérant depuis l'intérieur de l'institution avec le mouvement et en lui fournissant quand ils le pouvaient armes et renseignements ; d'autres n'ont pas voulu exposer à des représailles les membres de leur famille qu'ils auraient été contraints d'abandonner derrière eux en fuyant ; d'autres encore n'ont jamais eu confiance, ni dans l'organisation et les capacités d'une Armée Syrienne Libre sous-équipée, ni dans la personne de ses commandants successifs ; d'autres ont craint d'être marginalisés, si ce n'est suspectés, en rejoignant une révolution dont la majorité des acteurs appartenaient à la communauté sunnite majoritaire ; d'autres enfin ont été inquiétés par l'apparition des jihadistes et par leur affirmation progressive au détriment des unités d'inspiration nationaliste.
Ancien de la Garde Républicaine, qui vient d'être durement châtiée par les raids israéliens en raison de son rôle dans la livraison au Hizbollah libanais de matériels sensibles, Manaf Tlass estime être le seul officier supérieur sunnite capable d'inspirer confiance à ses anciens camarades alaouites. Il est convaincu qu'ils le rejoindront dès son retour en Syrie, pour mettre un terme à des tueries qui n'aboutissent à rien d'autre qu'à accroître chaque jour les souffrances, les démolitions et les haines. Ensemble, ils écarteront Bachar Al Assad et poseront les bases d'une solution. Elle prendra, dans un premier temps, la forme d'un conseil présidentiel intérimaire composé d'un nombre égal d'officiers supérieurs et de personnalités civiles des deux bords.
Le régime a donc pris les devants. Informé des grandes lignes de ce projet, il lui a ajouté des détails de son cru ou en a modifié les priorités, faisant de Bachar Al Assad le vainqueur, de Manaf Tlass l'instrument, des jihadistes les victimes et des révolutionnaires... les dindons.
Certes, il est à craindre désormais que des affrontements soient inévitables avec les groupes jihadistes qui refuseraient de quitter la Syrie pour aller se battre ailleurs après le renversement de Bachar Al Assad. Ils pourraient l'être aussi avec les salafistes, s'ils veulent mettre en place par la force un Etat islamique rejeté par la majorité des Syriens. Mais, si le général Tlass fait de cette confrontation une priorité, il ne sera pas suivi par les révolutionnaires. Ceux-ci n'ont aucune responsabilité, à la différence du pouvoir, dans l'apparition des jihadistes en Syrie, et le phénomène n'aurait pas pris cette ampleur si la communauté internationale n'avait pas joué le pourrissement, certains pays par intérêt et cynisme, les autres par frilosité et indécision. Les révolutionnaires syriens ont dit et redit qu'ils n'avaient rien de commun avec ces combattants, dont ils ne partageaient ni les méthodes, ni les projets, mais auxquels ils n'avaient pas les moyens de s'opposer. Le seul objectif qui les rapproche est le renversement du chef de l'Etat et des piliers militaires et sécuritaires de son régime, qui reste pour tous la priorité.
La divulgation de ce plan et son imputation aux Américains entrent donc dans une stratégie de discrédit de Manaf Tlass. Qu'elles soient exactes ou pas, ses différentes étapes et composantes - priorité donnée à l'affaiblissement et à la division des forces opposées au régime, assujettissement du général aux Américains et aux Russes, autonomie des militaires vis-à-vis des politiques... et ralliement final au régime avec lequel le déserteur n'aurait pris ses distances que pour servir ses desseins - sont en effet de nature à susciter le trouble et à provoquer la suspicion.

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