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Tuesday, November 03, 2009

Parlons Résistance


Parlons Résistance :
Par Natalie Abou Shakra
Palestine-01-11-2009

Selon Eid, « si vous frappez l'occupation au cœur de son existence, à travers sa relation stratégique avec les États-Unis, à travers le boycott d'Israël dans tous ses aspects […], si toutes les factions islamiques palestiniennes, par exemple, du Jihad Islamique au Hamas, qui sont toutes soutenues par les mouvements islamiques du monde entier, font la promotion de BDS dans leurs discours, quand chaque dirigeant d'un mouvement islamique demandera le boycott des produits US et israéliens jusqu'à la mise en œuvre de chaque droit fondamental palestinien, alors nous pourrons parler de la voie de la libération. »

Le choix de la résistance civile pour défier l'occupation israélienne est considéré par certains comme une forme de « reddition ». Lors d'un entretien [en Arabe] sur Al Aqsa le 13 octobre 2009, les militants palestiniens Mazen Qumsiyeh et le camarade Haidar Eid répondent à ces questions.
Eid a été interrogé sur la signification de la résistance civile, et il a parlé des nombreuses expressions appliquées à la résistance non violente, la résistance civile, la lutte non violente, et des définitions multiples de chacun de ces termes. Il y a, a-t-il dit, la lutte non violente de Ghandi, « Satyagraha » qui dépend totalement du pouvoir du peuple et de la force du boycott économique des produits de l'occupant. « Ce qui s'est passé en Afrique du Sud, c’est que ce concept a été développé pour inclure des formes multiples et différentes de lutte qui se complétaient les unes les autres. Et l'accent a été mis, dans la dernière partie de l'Apartheid, pendant les années 80, sur le boycott sous toutes ses formes. » Eid a souligné que les quatre piliers de la lutte en Afrique du Sud doivent être considérés comme un modèle dans la lutte palestinienne.
Dans le contexte palestinien, le mot « paix » a fini par prendre une connotation négative, et Eid explique que c’est dû aux processus de « l'industrie de la paix » auxquels les Palestiniens ont été constamment confrontés, et en particulier de 1993 à aujourd'hui, où la paix en tant que processus n'a pas été liée à la réalisation de la justice pour le peuple palestinien et le droit au retour pour les réfugiés avec réparation pour des décennies de souffrance, d'éloignement, de condition de réfugiés et d'exil. « Lorsque nous parlons de paix, nous ne parlerons que de la paix qui conduit à la réalisation des droits légitimes du peuple palestinien. » Ce que la politique colonialiste et l'occupation militaire directe de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza depuis 1967 exigent, dit Eid, est un amalgame des différentes formes de luttes. Et, comme tel, l'appel palestinien au Boycott, qui rassemble et constitue un terrain d'entente de toutes les factions nationales et islamiques palestiniennes, a été initié et appelle la communauté internationale officielle et non officielle à boycotter Israël.
A la suite de cette initiative, le BNC [BDS National Committee – Comité national Boycott Désinvestissement et Sanctions] a été créé en 2005, auquel participe toutes les factions nationales et islamiques palestiniennes.« Je crois que nous, à Gaza, contrairement à la Cisjordanie, ne nous sommes pas beaucoup investis dans d'autres formes de résistance. Je ne crois pas que la lutte armée, à laquelle je ne suis pas opposé et dont je pense qu'elle doit aller de pair avec les autres formes de résistance, soit suffisante, étant donné le déséquilibre absurde de puissance entre l'État israélien et la résistance nationale et islamique palestinienne – le pouvoir populaire est nécessaire lui aussi. » Eid a mentionné que si une minorité s'implique dans la résistance armée, la majorité de la population, « des fermiers aux intellectuels et aux universitaires » doit s'engager davantage dans la résistance civile à l'occupation. « Pouvons-nous imaginer le peuple palestinien sans Edward Said, Ghassan Kanafani, Mahmoud Darwish ? » Eid demande : « Ce qui fait que ces Palestiniens se sont démarqués est qu'ils ont mis l'accent sur le fait que la lutte contre l'occupation israélienne est une lutte idéologique : nous devons vaincre la mentalité sioniste que cette terre est pour les Juifs, et nous, Palestiniens, devons prouver au monde que notre position morale est plus forte, que le peuple palestinien dans sa résistance, qu'elle soit armée ou civile, ré-humanisera les Israéliens, contrairement à ces derniers qui dépouillent les Palestiniens de leur humanité. »Qumsiyeh, répondant à la question de ce qu'est la résistance civile, a mentionné que la lutte palestinienne a, depuis le mandat britannique jusqu'à aujourd'hui, impliqué la résistance sous toutes ses formes : de la résistance civile à la résistance armée.« Sumuud » [endurance] en elle-même est la résistance, » dit Qumsiyeh. Des actes simples comme « se marier, aller à l'école, lire un livre » deviennent des actions de résistance. « Lorsqu'un étudiant arrive dans ma classe à 8h le matin après avoir passé de nombreux checkpoints – c'est de la résistance, » note Qumsiyeh.La résistance civile est inclusive [à un moment où l'exclusivité semble dominante] : d'une femme à un enfant et à une personne âgée, tous peuvent résister. Et c'est ça qu'impliquent tant les actions des universitaires que celles des activistes.« Nous devons tous regarder vers Bil'in, » dit Qumsiyeh. « Les manifestations contre le mur ont lieu depuis des années, sans hésitation et en cohérence. » Cette résistance civile n'a pas émergé qu'à Bil'in mais, plus récemment, à Gaza, dit Eid, lorsque les Palestiniens de la Bande de Gaza ont essayé de briser le mur les séparant de l'Égypte, deux fois, en formant une chaîne humaine d'un bout à l'autre de la Bande. Beit Sahour, la ville d'où vient Qumsiyeh, fut un exemple de résistance et de désobéissance civiles, pendant la Première Intifada, selon Eid. « Lorsque les Palestiniens de Beit Sahour ont tous remis leurs cartes d'identité à l'officier militaire local, » ce fut, dit Eid, un exemple de résistance civile.
Qu'en est-il de l'utilisation de corps et de boucliers humains ? Eid dit que c'est une des formes les plus sublimes de résistance civile, se servir du corps pour combattre les balles et les bombes, pour protéger et défendre la maison et la terre.
Une question est posée : « Cette sorte de résistance crée-t-elle un chaos dans le psychisme de l'occupant ? » Eid répond que Mandela a écrit là-dessus dans son journal et que Said a abordé cette question un peu avant sa mort : « Qui possède le terrain moral le plus fort : le colonisé ou le colonisateur, l'occupé ou l'occupant ? » Selon Eid, un civil qui lutte pour ses droits moraux et légaux possède une force morale plus élevée et donc, attaque psychologiquement l'occupant. « C'est ce qui s'est passé avec les nazis, c'est ce qui s'est passé avec le colonisateur blanc sud-africain, » dit Eid.
Eid mentionne qu' « Israël est une des sociétés où la violence domestique est la plus fréquente » et « qu'il y a une relation directe entre la violence domestique et les cas de suicide dans la société israélienne et entre l'occupation en Cisjordanie, dans la Bande de Gaza et sur les terres de 48. » Il continue : « Je pense que c'est très important. Il y a par exemple beaucoup de soldats US qui se suicident peu de temps après leur retour d'Irak et d'Afghanistan. » Ainsi l'occupé a un pouvoir moral et psychologique qui peut être utilisé contre l'occupation elle-même.Eid réaffirme que le déséquilibre de puissance évident, énorme dans le cas israélo-palestinien requiert de s'éloigner de négociations qui ne sont qu'une perte de temps : « Israël a plus de 450 têtes nucléaires, des Apaches, des F-16, l'alliance la plus stratégique avec les États-Unis. Je veux dire, comment pouvons-nous, nous les 10 millions de Palestiniens, dont plus de la moitié vit en diaspora et dans des camps de réfugiés dans des conditions épouvantables, combattre tout ça ? Par le pouvoir du peuple. »Cette ouverture permet de réunir des juifs israéliens contre l'apartheid et la politique de colonisation avec les Palestiniens de 48, avec le fermier, l'étudiant, le pêcheur et tous ceux qui soutiennent ces droits universels et ils partagent tous ce fondement moral qu'ils peuvent canaliser par la résistance civile, par le boycott – qui est une des formes les plus simples de résistance, et en même temps une des plus puissantes.Selon Eid, « si vous frappez l'occupation au cœur de son existence, à travers sa relation stratégique avec les États-Unis, à travers le boycott d'Israël dans tous ses aspects […], si toutes les factions islamiques palestiniennes, par exemple, du Jihad Islamique au Hamas, qui sont toutes soutenues par les mouvements islamiques du monde entier, font la promotion de BDS dans leurs discours, quand chaque dirigeant d'un mouvement islamique demandera le boycott des produits US et israéliens jusqu'à la mise en œuvre de chaque droit fondamental palestinien, alors nous pourrons parler de la voie de la libération. »

Source : Moments of Gaza


Traduction : MR pour ISM

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