Discours stratégique et déroute israélienneC’est au terme de la semaine consacrée à honorer la mémoire des martyrs de la révolution islamique au Liban, les martyrs du Hezbollah et notamment ses trois dirigeants, Sheikh Ragheb Harb, Sayyid Abbas al-Moussawi et le dirigeant combattant Imad Moughnieh, que Sayyid Hassan Nasrullah, secrétaire général du Hezbollah, a prononcé un discours historique devant
une foule toujours aussi fidèle et enthousiaste, annonçant la nouvelle stratégie de la résistance.
Analystes politiques et stratèges militaires, de tous bords, reconnaissent qu’une nouvelle phase du conflit opposant la nation arabo-musulmane à l’entité coloniale sioniste est désormais en cours : celle de la riposte au coup pour coup, celle de la capacité de la résistance islamique à riposter aussi durement que l’ennemi israélien.
Sayyid Nasrullah n’a pas hésité à confirmer ce que les responsables israéliens disent depuis la fin de la guerre de juillet 2006 : oui, nous nous armons, oui, nos nouvelles armes sophistiquées peuvent atteindre toute la Palestine occupée. Mais au-delà de cette confirmation, le chef de la résistance arabe a annoncé que le Hizbullah était en mesure de riposter au coup pour coup : « Si vous attaquez l’aéroport du martyr Rafiq al-Hariri à Beyrouth, nous attaquerons l’aéroport Ben Gourion à Tel Aviv, si vous attaquez nos centrales électriques, nous attaquerons vos centrales électriques, si vous attaquez nos usines, nous attaquerons vos usines », tout en faisant remarquer que si la population au Liban était habituée à vivre sans électricité, les israéliens ne le sont pas.
Pour la première fois depuis l’occupation et la colonisation de la Palestine, il y a 62 ans, un dirigeant arabe, et quel dirigeant ! remet Israël à sa place, non pas en lançant de vagues « menaces », comme le faisaient auparavant des chefs enthousiastes mais impuissants, mais en promettant, comme le promettent toujours les « hommes de Dieu », les combattants du Hezbollah et leur dirigeant, que toute attaque israélienne sera immédiatement suivie d’une attaque de même niveau. Il ne s’agit pas, comme l’a rappelé Sayyid Nasrullah, d’occasionner des trous dans quelques maisons de Tel Aviv, si c’est à cela que les dirigeants israéliens pensent, non, il s’agit de bombarder plusieurs immeubles de Tel Aviv si un seul immeuble de la banlieue sud de Beyrouth est bombardé. Pour faire encore plus comprendre les choses et assurer que ses paroles ne sont pas gratuites, il a précisé l’importance stratégique pour les Israéliens de toute la zone située au sud de Haïfa, autour de Tel Aviv : c’est là où se trouvent la majeure partie de la population israélienne, des agglomérations industrielles, les principales centrales électriques, les sièges de plusieurs centres vitaux pour la colonie sioniste : militaires, administratifs et de recherches stratégiques.
Ce discours historique et stratégique n’a pas été diffusé sur les chaînes israéliennes, la censure militaire d’un pays jugé démocratique par la « communauté internationale », ayant sévèrement agi. Seuls quelques passages du discours ont été diffusés, mais ce qui est encore plus significatif, est le silence des dirigeants israéliens. Même Lieberman, toujours prêt à bavarder, n’a pas bronché. Car ce que le dirigeant de la résistance leur a annoncé, sans détours, c’est que le Hezbollah est armé de telle manière qu’il peut riposter à toute attaque, et nul ne l’en empêchera. Il ripostera aussi loin et aussi durement à toute attaque sioniste. Il est évident que ni les dirigeants sionistes, ni leurs alliés, ne s’attendaient à un tel discours.
Concernant son armement, le Hizbullah leur a fait comprendre plusieurs choses : d’abord, le Liban n’avait besoin de personne pour s’armer, la résistance a et aura ce qu’il faut (et si cela ne leur plaît pas, qu’ils boivent la mer, a-t-il ajouté). Ceci en réponse aux Etats-Unis et à la France et tous les Etats qui promettent d’équiper l’armée libanaise, dans un souci de conflit interne. Depuis des mois, les responsables militaires américains font la navette et des discours, promettant d’équiper l’armée libanaise, mais de manière à maintenir la supériorité militaire aérienne, terrestre et maritime, favorable à la colonie sioniste. Donc, le Liban n’a pas besoin de tous ces Etats qui marchandent la sécurité d’un pays. Grâce à la résistance islamique qui a su s’armer, ce marchandage n’a plus de raison d’être. Ils vendront ce qu’ils veulent à l’armée libanaise, d’autres armes sont là pour protéger le pays.
Sayyid Hassan Nasrullah a également fait comprendre aux parties libanaises internes que ni l’ONU, ni la communauté internationale, ni les Etats-Unis, ni la France « amie » du Liban, ne le protègeront contre les attaques israéliennes. C’est sur ses propres forces qu’il faut compter, comme pour la guerre de libération du Liban, de 1982 jusqu’à la libération. Il a expliqué que la communauté internationale ne respecte que le puissant : Israël n’a jamais appliqué une résolution de l’ONU ou du conseil de Sécurité, ni en Palestine, ni dans aucun pays arabe. C’est pourquoi il faut acquérir cette puissance, et c’est ce que le Hezbollah a fait. Dorénavant, avant toute attaque, il faudra réfléchir mille fois, et non une seule. A ce propos, le dirigeant de la résistance islamique a expliqué pourquoi les sionistes sont actuellement dans une impasse : ils ne peuvent faire la guerre alors qu’ils veulent la faire. Depuis leur défaite en 2006 (Liban) et 2009 (Gaza), ils réfléchissent à une guerre qu’ils veulent victorieuse, rapide et décisive. Il est évident que plus le temps passe, moins ils pourront la mener, car les résistants, palestiniens et libanais, et même la Syrie et l’Iran, profitent de ces moments de déroute israélienne, pour s’armer, s’équiper, réfléchir sur de nouvelles stratégies, récupérer des renseignements sur le front intérieur, bref, les résistants se préparent.
Le dirigeant de la résistance islamique a fait également remarquer aux Libanais que la stratégie militaire du Liban devait être unique, puisque les Libanais ne cessent d’évoquer qu’ils sont uniques : puisque vous l’êtes, puisque vous ne cessez de le clamer, adoptez donc cette nouvelle stratégie de défense, unique dans le monde : l’alliance entre la résistance, l’armée et le peuple résistant. Car, sur le plan intérieur, quelques personnalités politiques réclament encore la démilitarisation du Hezbollah, jugeant même que tant que le parti de la résistance existe, Israël prendra le prétexte d’attaquer le Liban. N’ayant pas encore tiré les leçons de l’histoire, en retard d’un demi-siècle et de deux guerres, ces voix discordantes représenteront, si elles maintiennent leur discours, un appel à l’agression israélienne, comme l’a expliqué Sayyid Hassan Nasrullah. Et dans une telle situation, elles vont inexorablement à leur perte.
Ce discours historique du chef de la résistance, non seulement libanaise, mais arabe et musulmane, contre l’ennemi sioniste, aura certainement un impact décisif sur toute décision américano-sioniste dans la région. Alors que les dirigeants sionistes ne cessent, depuis la fin de la guerre contre la bande de Gaza, de menacer haut et fort toutes les résistances et les pays qui refusent leur diktat, les voilà servis : ils ont déjà reçu la réponse du ministre syrien des affaires étrangères, qui a remis Lieberman à sa place, le traitant en plus de voyou, et ils reçoivent aujourd’hui la réponse du Hezbollah. Vous voulez la guerre ? Osez donc la faire. Vous voulez attaquer et détruire ? Osez donc ! Nous sommes prêts, « le martyr Imad Mughnieh vous a préparé des dizaines de milliers de combattants prêts pour le martyre ». Nous vous attendons, dans les vallées, les montagnes, les villages, les ruelles et les maisons. Et en plus, nous avons les moyens et nous riposterons de la même manière.
Tant il est vrai que le discours de Sayyid Nasrullah a inauguré une nouvelle étape dans la lutte de libération de la Palestine, il est encore plus vrai que les sionistes sont en pleine déconfiture, notamment avec l’assassinat du responsable des Brigades Sheikh Izzidine al-Qassam, à Dubaï. A présent, c’est le Mossad lui-même, considéré comme la fine fleur des renseignements dans le monde, qui se retrouve coincé et remis en cause, même par les Israéliens. Au premier abord, son opération semblait réussie : il réussit à faire entrer neuf agents dans un pays arabe et assassine en quelques minutes le martyr Mabhouh, avant de quitter le pays dans l’heure qui suit. Mais Dubaï, pays allié des Etats-Unis et qui se trouve dans le camp de la normalisation avec Israël, ne peut accepter ce défi. Ses caméras réussissent à désigner les coupables, entrés dans le pays avec des passeports falsifiés, passeports entre autres européens. Il est vrai que les puissances alliées des Israéliens ne réagissent pas à l’assassinat lui-même, au contraire, si l’opération n’avait laissé aucune trace, ils l’auraient bénie, mais le Mossad a laissé de lourdes traces, mondialement découvertes. Colère apparente ou véritable des chancelleries européennes ? La Grande-Bretagne et la France devront réagir à cet acte de banditisme international, ce qui pose le problème du trafic de passeports par le Mossad, présent dans toutes les capitales et villes européennes, et même dans les aéroports. Mais aussi trafic de passeports falsifiés d’Israéliens eux-mêmes. Le Mossad agit-il contre ses propres citoyens ? Le Mossad et son dirigeant, présenté cependant une semaine auparavant, comme un des meilleurs chefs de ce service, semblent avoir perdu la main. Ce qui est certain, c’est que l’assassinat du martyr Mabhouh commence, avant même la riposte promise du Hamas, par avoir de lourdes conséquences sur l’Etat colonial, qui n’a pas encore entièrement résorbé l’affaire du rapport Goldstone.
Il va sans dire que les promesses de venger les martyrs, le martyr Imad Mughnieh (Hezbollah) et le martyr Mabhoud (Hamas) ne vont certainement pas laisser les dirigeants sionistes dormir tranquilles. Eux qui déjà se plaignaient de mal dormir parce que les Palestiniens augmentent en nombre tous les jours (déclaration de leur dirigeante Golda Meier), les voilà qui devront prendre toutes les précautions avant de circuler, dans et hors de la colonie. Sayyid Nasrullah le leur a rappelé : nous ne sommes pas pressés, nous prendons notre temps, notre vengeance sera à la mesure du dirigeant martyr (c’est-à-dire immense). Il a ajouté : Nous avions eu, ces deux dernières années, de nombreuses possibilités de frapper des petites cibles, mais nous choisissons nos cibles et nous dirons : voici la riposte du Hezbollah à l’assassinat de notre dirigeant martyr. Nous choisirons le lieu, le moment et la cible.. Et s’adressant à ceux qui le questionnent ou qui pensent que la riposte est incertaine, il a répondu : que personne ne fasse pression sur nous, que personne ne fasse de la surenchère ! Notre ennemi est inquiet, laissez-le s’inquiéter, tous les jours, en tout lieu et pour toute cible.. Et aujourd’hui, pour la commémoration de l’assassinat de Hajj Imad, je le dis : « nous voulons une cible de la taille de Imad Mughnieh, non pas par vengeance, mais pour protéger nos dirigeants, nos cadres et toute la cause qu’a défendue Ima Mughnieh. »
Quand donc les Israéliens comprendront que ce pays, la Palestine, ne pourra jamais être pour eux un lieu de sécurité ? Tant que cette colonie existe, ceux qui y vivent en colons sont menacés par la résistance, de plus en plus puissante et capable.
CIREPAL (Centre d’Information sur la Résistance en Palestine)
18 février 2010