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Saturday, March 21, 2009
A Jérusalem-Est, le quartier Al-Boustan s'organise contre sa destruction annoncée
La résistance s'est organisée. Une grande tente a été dressée et un comité de défense a été désigné. Le quartier Al-Boustan ("le jardin") à Jérusalem-Est est sur le pied de guerre. Les autorités israéliennes ont projeté de démolir 88 maisons pour y créer un parc. Le projet date de quatre ans, mais il vient d'être remis sur la table, et des ordres de démolition ont été notifiés aux 1 500 habitants de ces maisons qui, dit la mairie, ont été construites sans permis de construire.
"Certaines de ces maisons datent d'avant l'occupation de 1967, et les demandes de permis ne sont jamais accordées", proteste Abed Shalode, du comité de défense. Des cartes ont été déployées sur le mur pour expliquer comment la colonisation est en marche à Jérusalem-Est.
Des zones plus claires cernées de rouge indiquent les emplacements des implantations juives et leur progression dans le faubourg de Silwan, dans lequel figure le quartier Al-Boustan. Située au pied de l'esplanade des Mosquées, le Mont du Temple pour les juifs, près de la face sud de la vieille ville, cette zone est âprement convoitée par les colons pour en faire un prolongement du quartier juif.
C'est à cet endroit qu'est située la cité de David. D'intenses fouilles archéologiques y sont menées pour retrouver les traces de l'ancien royaume et démontrer que cette terre est bien juive. D'autant que la municipalité de Jérusalem projette d'en faire un lieu touristique.
"Pas de site touristique sur les ruines des maisons de 1 500 habitants", proclame un écriteau placé sous la tente. Deux maisons ont déjà été détruites, et la population craint l'arrivée soudaine des bulldozers. "La réaction sera violente", prévient Daoud Siam, né à Al-Boustan il y a soixante-dix ans. "Ils veulent nous humilier, nous provoquer, voler notre terre, mais nous ne nous laisserons pas faire", ajoute-t-il en mettant directement en cause le nouveau maire de Jérusalem, Nir Barkat, qualifié de "boutefeu de la ville sainte".
Elu il y a quatre mois, ce dernier a fait savoir que "la loi devait être respectée quelles que soient l'identité, la race, la résidence et la religion". Al-Boustan est devenu un abcès de fixation des tensions israélo-palestinienn es. Vingt et un lauréats du prix Israël, parmi lesquels des écrivains célèbres, ont lancé un appel pour que cessent les démolitions à Jérusalem-Est. Hillary Clinton, secrétaire d'Etat américaine, s'est émue de la situation, lors de sa visite début mars, en déclarant que les démolitions "ne facilitent pas le processus de paix" et "violent la feuille de route" du plan de paix international, qui prescrit un gel de la colonisation. Ce commentaire n'a pas été du goût de Nir Barkat qui l'a qualifié de "mauvais signal" envoyé à "ceux qui ne respectent pas la loi".
Al-Boustan est devenu le test de la volonté de Washington de prendre une position claire contre la poursuite de la colonisation qui ruine la possibilité de créer un Etat palestinien avec Jérusalem-Est comme capitale comme le souhaitent les Palestiniens. Cinquante-cinq autres maisons sont également dans le collimateur à Choufat, au nord de Jérusalem. Craignant un raidissement du prochain gouvernement israélien, qui pourrait être très à droite, l'Autorité palestinienne est sur le qui-vive. Soixante-dix familles juives vivent déjà à Silwan.
La fondation Elad, une organisation nationaliste religieuse, tente par tous les moyens de conquérir de nouveaux espaces, maison après maison. A chaque succès, les colons font immédiatement flotter le drapeau israélien pour marquer le territoire. La municipalité a précisé que seules les maisons construites après 1992 étaient concernées par les démolitions. Les résidents ont demandé en vain que cette zone soit classée résidentielle. Le rejet a été finalement notifié le 17 février. Depuis, c'est l'inquiétude.
Très impliqué à Jérusalem, le cheikh Raed Salah, dirigeant arabe israélien (il dirige la branche nord du Mouvement islamique), est venu dire sur place : "Notre position est claire : soit nous vivons sur notre terre, soit nous y serons enterrés."
Michel Bôle-Richard - Le Monde du 19 mars 2009
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