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Monday, August 31, 2009


Dignité, sacrifice et résistance... des gens
simples en Irak
Hussein Al-Mâadhidi
25-08-09

Tableau numéro un: Abou Adham

Quand j'ai connu Abou Adham, avant l'occupation, il était simple agent de police, pauvre, démuni de tout et contraint, dès qu'il ôte son uniforme, à la fin de son service quotidien, de rejoindre un deuxième travail dont il ne revient que tard dans la nuit, fatigué et abattu.Il se maria en empruntant tous les frais du mariage, jusqu'à la dot de la mariée à quelques riches du voisinage et ne s'en acquitta totalement qu'après la naissance de son troisième enfant, Adham.
C'est dans ces conditions qu'il fut surpris par l'occupation avec son train de malédictions: la misère noire, la terreur sous toutes ses formes, l'humiliation permanente. Dans son quotidien, il manquait de tout sauf de cette dignité à toute épreuve et de cette fierté intérieure que rien ne pouvait entamer.

Nombre de ses collègues ont fini par reprendre leur travail au sein de la police gouvernementale pour devenir les auxiliaires de l'occupant, moyennant un salaire garanti et des prébendes généreuses, mais au prix d'une dignité bafouée.Abou Adham, notre homme, n'a rien d'autre justement que cette dignité, sorte de trésor personnel, que l'occupant a piétinée et bafouée pour son peuple, au vu et au su de monde entier. C'est en son nom qu'il refusa de suivre la voie ses collègues, de réintégrer la police et de mettre sa main dans celle de l'occupant. Il s'obstina dans son choix malgré sa misère et celle de sa famille, préférant le besoin à la collaboration, la dignité à la compromission.
Il commença par dénicher un petit travail de vendeur dans un magasin, contre un salaire de misère puis s'installa à son compte, derrière un étal de bric et de broc, sur le trottoir d'une rue. Le résultat n'étant pas meilleur que dans le cas précédent, il délaissa le commerce pour tenter sa chance ailleurs: ramasser des pierres dans les oueds environnants pour les revendre en ville. Ce travail fut de courte durée, la demande en ce produit étant presque nulle dans un pays où chaque jour apporte son lot de destructions mais où la reconstruction tarde à venir.
Abou Adham troque alors sa pioche contre une hache et s'en va ramasser du bois, bien plus demandé que la pierre. C'est là qu'il sembla trouver son bonheur un instant.
Entre-temps son fils Adham accomplit ses dix ans, âge où un enfant, est déjà en mesure d'aider sa famille. Le père l'envoya alors auprès d'une de ses connaissances, un commerçant tenant boutique au souk de Haditha, ville toute proche.
Il devrait servir de coursier comme il y en a tant dans tous les souks. Mais la providence en décida autrement.
Il y a quelques jours le petit Adham fut tué dans l'explosion d'une voiture piégée, en plein marché de Haditha. Un éclat l'a atteint au cou, séparant sa tête de reste du corps. Ce sont les forces de l'ordre qui placèrent la voiture piégée pour exploser au milieu de la population civile. Ce sont les autorités gouvernementales même qui l'affirmèrent.
Accablé par une double tragédie, celle d'avoir perdu son fils de cette façon mais aussi de se sentir coupable pour l'avoir envoyé se tuer ainsi, Abou Adham l'enterra lui-même, refusa d'organiser la cérémonie traditionnelle pour recevoir les condoléances et s'enterra chez lui toute la journée.

Le lendemain, il s'arma de nouveau de sa hache et repartît chercher du bois, le cœur brisé mais plein de foi, comme si de rien n'était. La famille doit vivre, quoi qu'il en coûte!


Traduit de l'arabe par Ahmed Manai


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