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Friday, March 04, 2011

Préservons ce changement salutaire


CONSIDERATIONS XI

Tunisiens, préservons ce changement salutaire

Par Mohsen Toumi,

On qualifie de « Révolution » ce que vit actuellement notre pays. Je déteste les révolutions Elles sont toujours sanguinaires et finissent par dévorer leurs initiateurs y compris les plus nobles. Elles dégénèrent, deviennent une dictature à leur tour et le champ de règlements de compte personnels.
Je préfère parler de « Changement salutaire» .Reste à savoir si un changement peut tout effacer du jour au lendemain. On qualifie de « Jasmin » ce que nous vivons aujourd’hui .On l’a employé aussi en 1987.Ce cliché nous colle à la peau : un bonhomme aux grands yeux bovins, aux joues rubicondes et un bouquet de jasmin piqué derrière l’oreille. Autrement dit le tunisien « Zentil » Cette caricature doit disparaître.. Nous sommes des gens calmes. Mais quand la coupe amère est pleine, nous ne restons pas les bras croisés. Sans remonter dans l’histoire de la lutte pour l’indépendance, il ne faut oublier ni le 26 janvier 1978, ni les émeutes du pain de 1984, par exemple, ni les évènements de Rdeyef de l’année dernière. Un de nos fils, Mohammed BOUAZIZI, s’est immolé par le feu .Il ne pouvait plus supporter les injustices de la corruption et la brutalité de la dictature. Il prend place dans nos cœurs et dans nos consciences .Son sacrifice demeurera un point focal dans l’histoire de notre patrie


La mort d’un tigre qui n’avait rien demandé à personne

Les revendications fusent de toutes parts et sont légitimes. Un cri les résume « Plus jamais çà » Reste à savoir qui veut une mutation pacifique et organisée, et qui désire une transmutation immédiate même au prix d’une guerre civile. Nous avons donc le choix entre les patriotes et les irresponsables ce qui me rappelle le début d’une vieille chanson « Ya Haoua Khaïr Min Taoua Amma Ana Oualla Houa » (1) Une propagande et des manuels d’histoire trafiqués ont laissé croire que la Tunisie n’existe que depuis le 7 novembre 1987. Mais nos fils regardent, entendent, analysent.

Nous leur soumettons une comparaison .Elle confortera leur indignation : quand Bourguiba a senti qu’il devait choisir entre Wassila et le peuple tunisien, il a divorcé .Je n’aimais pas cette dame mais je reconnais que c’était une militante, une patriote, une femme cultivée et que sa relation avec Si El HABIB avait été une véritable histoire d’amour. Mr Ben Ali , confronté au même choix , opta pour une gourgandine et la vermine des Trabelsi qui a fondu sur notre terre , ses richesses et le fruit de notre travail comme « Un vol de gerfauts hors du charnier natal » (2) Ils ont mis le pays en coupe réglée et n’ont jamais songé qu’un jour leurs crimes (car il s’agit bien de crimes) ne pourraient plus être tolérés. Ils imaginaient que la peur était pour leurs saccages une nuit complice. Ils se sont trompé..il est nécessaire de les traquer , de les arrêter, tous et de demander leur extradition s’ils se sont réfugiés hors de notre territoire. Nous ne les lyncherons pas. Nous sommes un peuple de vieille culture et de civilisation millénaire. Nous les déférerons devant des tribunaux enfin expurgés, eux aussi, des juges corrompus. Des « manifestants » (lesquels ?) ont dévasté la villa de Sakher Materi , gendre de la maquerelle de Carthage et agent double des intégristes .C’était un bien mal acquis. D’autres propriétés aussi somptueuses et d’aussi mauvais goût existent. Qu’on en emprisonne les propriétaires s’ils sont encore là mais qu’on ne les pille ni n les brûle : elles reviennent au patrimoine des tunisiens .Durant les premiers jours chez le Materi, circulait un tigre. Il est mort sans avoir demandé quoi que ce soit à qui que ce soit. Son propriétaire, lui, s’était déjà envolé. Dommage !


Le gouvernement de transition

C’est bien de renverser un régime. C’est mieux encore de savoir par quoi le remplacer et autant que possible par un système plus juste et plus démocratique. Un gouvernement de transition a été mis sur pied, pour ce faire. Il est dirigé par Mr Mohammed Ghannouchi , premier ministre dans le gouvernement précédent (3).Il n’a pas sorti de sa poche une liste déjà prête .Il a consulté toutes les forces vives de la nation ,partis politiques , ONG , d’autres représentants de la société civile et, surtout ,l’UGTT ,l’historique et unique syndicat .

.Un gouvernement de transition a été constitué, au sein duquel tous ces interlocuteurs ont obtenu des portefeuilles .Aussitôt, des voix se sont élevées pour dénoncer cette formation .Depuis dimanche 23 janvier et jusqu’à ce mercredi 25, des centaines de personnes venues du centre du pays campent jour et nuit devant le siège du gouvernement, à la Kasbah : ils refusent la reconduction de ministres du précédent gouvernement, surtout dans les ministères de souveraineté. MR Ghannouchi entreprend actuellement un remaniement. D’un point de vue émotionnel, les assiégeants (pacifiques) désirent tout changer et tout de suite Mais qu’en est-il d’un point de vue rationnel ?

Les exigences

Des ministres « Nouveaux » ont démissionné à l’exception de MR. Ahmed Brahim, du parti Ettajdid, chargé de l’enseignement supérieur. Il est regrettable que d’autres nouveaux venus n’aient pas fait montre du même sens des responsabilités. Quelles pressions ont-ils subis pour se dérober ?
Elles viennent de l’UGTT Nous avons toujours considéré cette glorieuse centrale syndicale comme l’un des piliers majeurs de la société tunisienne. En des circonstances historiques précises, certes, elle ne pouvait pas se dérober aux responsabilités politiques. Ses leaders les ont assumées avec panache et courage qu’il s’agisse de Farhat Hached , pendant la lutte pour l’indépendance ou de Habib Achour , durant la même période aussi et en janvier 1978 (4) ,avant sa disparition ,.Ces deux grandes figures n’ont jamais postulé à un quelconque poste ministériel. Mais n’est pas Farhat Hached ou Habib Achour qui veut. Les syndicalistes, en ce janvier 2011, se découvrent une vocation gouvernementale.Ils ont accepté cinq ministères puis se sont dérobés en incitant d’autres entrants à démissionner à leur tour . L’UGTT rejoint ceux qui refusent la présence d’anciens ministres issus du RCD ( le parti de MR Ben Ali) et exigent un gouvernement « Purgé » . Depuis 23 ans, le syndicat ne s’est que tièdement manifesté. Il a eu des rapports corrects avec les ministres qui se succédaient. Alors, Pourquoi cette intransigeance et maintenant ? Pourquoi cette acceptation de ministères ? Même si un syndicaliste devient ministre du travail, il y a conflit d’interêts . Le rôle d’un syndicat n’est pas d’être au gouvernement, mais de défendre les intérêts de ses adhérents. Que se passe-t-il donc à l’UGTT ? Comment en est-elle arrivée à ces entrées et sorties vaudevillesques si elles n’étaient pas dangereuses pour la stabilité du pays ?


Jouerait-elle le pourrissement ? A quelle fin ? Ses dirigeants ignorent-t-ils que leurs tergiversations et leur alliance objective avec des éléments troubles pourraient plonger la Tunisie dans le chaos. ? Que signifie leur soutien à des adolescents sincères mais manipulés, qui confondent un changement que nous souhaitons, sans réserve, avec un Woodstock qui n’a en commun avec l’évènement musical de 1969 que la place de la Kasbah transformée en déchetterie ?
Plusieurs explications pourraient-être avancées. Nous en retenons une : la centrale syndicale est noyautée par les intégristes (surtout eux) comme beaucoup d’autres institutions telles que la LTDH, d’autres ONG, les Associations de Consommateurs, etc. Malgré la vigilance du commandement, ils auraient même infiltré l’armée au niveau de la troupe et des sous-officiers. Ils n’ont pas raté le RCD, bien entendu, comme nous le verrons..

Table rase ?

L’un des leitmotive de plusieurs manifestants est la révocation du gouvernement de transition de tous les ministres ayant servi sous les mandats de MR Ben Ali. Cela n’a pas de sens : durant 23 ans , il a bien fallu que le pays fonctionne. les tunisiennes et les tunisiens qui , au fil des ans , ont travaillé dans les administrations, les mairies, les ministères, se comptent par millions, Du chef de bureau au ministre, quiconque accède à un poste de décision ,se trouve harcelé pour avoir sa carte du RCD ,quand il ne la demande pas lui-même par prudence .On va mettre tout ce monde « Sur la touche » ? Comment faire marcher le pays en ce cas ? Ceux qui ont soif de postes doivent savoir qu’on ne s’improvise pas du jour au lendemain administrateur , diplomate ou capable de diriger un ministère. Nous sommes un pays plus qu’émergent : un pays avancé. Ce n’est pas parce qu’un manifestant crie plus fort que les autres ou se fait hisser sur les épaules qu’il acquiert des compétences ou une culture politique et sociale qu’il n’a jamais eues.
« .C’est la faute du régime .Il a privilégié les régions côtières et le nord-est aux dépends de l’intérieur du pays » . C’est une réalité. Mais ce n’est pas en occupant les places et les rues qu’on se transforme, magiquement, en gestionnaires compétent. Un état n’est pas un jouet . Je comprends les impatiences que génèrent l’injustice et la frustration. Je faits entièrement confiance aux jeunes gens dont je suis si fier pour ne pas se laisser manipuler et pour chasser les caractériels aigris qui les haranguent car ils n’ont d’ambition que pour leur destin personnel.
La rivière déborde après une pluie salvatrice mais finit toujours par rejoindre son lit.. Malgré tout ce que nous pouvons regretter, notre pays fonctionne ; c’est une superbe machine. Révisons ses rouages mais ne la cassons pas. Tout pas en arrière, tout retard, dans une mondialisation démente, pourrait compromettre l’avenir de notre jeunesse et , aussi ,celui des enfants qu’elle engendrera , Inchallah.

(*) De Sadek Thraya .Traduction MT « Eve, choisis dès maintenant : ou c’est moi ou c’est lui »

(2) En remplaçant la si digne Naïma Kéfi , fille du premier général de l’armée tunisienne, Mohammed El Kéfi (dont il était l’ordonnance), par une « Fille » , MR Ben Ali avait choqué tous ceux qui lui portaient encore de l’estime.

(3) Un homme intègre et un économiste de valeur qui a su gérer le développement de la Tunisie, quoique entravé par les pressions « Présidentielles » et les prédations couvertes par Mr Ben Ali. Il aurait pu démissionner, certes, mais le remède aurait été pire que le mal. Sa seule faiblesse est que ce n’est pas exactement un politique

(4) Le 26/01/1978 le directeur de la sûreté était Mr ben Ali.Il est honnête de remarquer qu’il avait joué un rôle modérateur qui avait déplu au pouvoir, à l’époque. On l’a remercié en 1980 et envoyé en Pologne, comme ambassadeur.


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