Le procès d’un dictateur ou le pari de la révolution égyptienne
par Abdelkader Dehbi
Alger le 03-O8-2011
En ce mercredi 3 Août 2011, correspondant au troisième jour du mois sacré de Ramadan – 1432 – vient de s’ouvrir au Caire, par devant une juridiction ordinaire, un procès qui, lui, est extraordinaire à plus d’un titre :
- Primo : de par la qualité des prévenus, puisqu’il s’agit rien moins que de juger l’ex dictateur égyptien en personne, Mohamed Hosni Moubarak et un certain nombre de personnages symbolisant la nomenklatura du régime : à commencer par ses deux fils, A’ala et Djamal Moubarak, ainsi que l’ex ministre de l’Intérieur Habib El-Adli, et plusieurs hauts responsables civils et militaires du régime aboli ;
- Secundo : de par la gravité des chefs d’accusations multiples retenus contre les prévenus accusés en particulier d’avoir commandité et ordonné des vagues de répression sanglante et massive ayant entraîné des centaines de morts, de blessés et de disparitions forcées, à l’encontre de populations civiles manifestant pacifiquement contre les abus du régime ; sans compter les dizaines d’affaires de détournements massifs de deniers publics, d’accaparements de patrimoines de la nation ou de cas de haute trahison couplée au sabotage criminel de l’économie nationale, comme le montre l’exemple du bradage d’énormes quantités de gaz naturel égyptien, livré clandestinement depuis des décennies, à l’entité sioniste ennemie ;
- Tertio : de par le caractère historique de ce procès, puisque ce sera bien la première fois dans l’Histoire contemporaine des pays arabes, qu’un ex Chef d’Etat et ses proches collaborateurs déférés devant la justice, comme n’importe quel citoyen, en raison de leurs crimes innombrables et de leurs forfaitures.
En dépit de nombreuses interrogations qui restent encore en suspens, quant à l’issue de ce procès, il ne fait plus aucun doute désormais, que le seul fait d’avoir traduit le criminel Moubarak et ses complices par devant un tribunal pénal égyptien, constitue en soi une grande victoire pour le peuple frère égyptien qui vient de signer là, une première historique et un précédent politique et psychologique aux conséquences les plus prometteuses pour la marche irrésistible de nos peuples, vers la liberté et la dignité, la démocratie et la justice.
L’ère des tyrans – qu’ils fussent rois, émirs ou présidents – touche désormais à sa fin, qui ont spolié la souveraineté des nations, confisqué la liberté des peuples et attenté à la dignité des citoyens, en s’accaparant des richesses de la nation et en bradant les ressources du pays, avec la complicité de puissances étrangères dont ils espéraient en retour, la complaisance, sinon la protection.
S’agissant en particulier de notre pays l’Algérie, cette image planétaire du pharaon boursoufflé du Caire, piteusement allongé sur sa civière aux cotés de ses complices, derrière les grillages d’une véritable cage aux fauves, va sonner comme un premier avis de passage, sonnant la fin de l’impunité, aux oreilles d’un Bouteflika et de sa fratrie, de leurs compères Belkhadem, Soltani, Bensalah et autres Ouyahia. Sans oublier bien sûr, leurs parrains militaires que sont les généraux-dafs comme les Nezzar, les Toufik, les Guenaïzia, les Ghezyel et toute la sinistre cohorte de tortionnaires et de miliciens à leur botte, qui ont plongé notre pays dans la guerre civile, au lendemain du Coup d’Etat du 11 Janvier 1992,
Tout ce beau monde aura à répondre un jour ou l’autre, collectivement et solidairement, des crimes imprescriptibles commis contre le peuple algérien ainsi que des pillages du patrimoine national et des détournements à grande échelle des deniers public, se chiffrant par milliards de dollars. Car, il n’est nullement écrit que le peuple algérien qui a payé le plus lourd tribut humain de l’Histoire de la décolonisation et subi l’une des guerres civiles récentes les plus meurtrières, restera à l’écart de la marche de l’Histoire. Et ce ne seront, ni les miettes de la rente pétrolière distribuées de manière régalienne, ni les augmentations et autres « rappels » à coups de millions de dinars en faveur des corps de sécurité, ni encore moins la pitoyable mascarade dite des « réformes » qui achèteront une quelconque paix civile d’où le peuple est absent.
En tout état de cause, la Justice de Dieu est indivisible. Elle passera pour tout le monde. Nécessairement.
http://abdelkader.blogs.nouvelobs.com/
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